Dans le cadre de ce projet, le LIT OUESTEREL a réuni des professionnels de la filière porcine pour co-concevoir des bâtiments d’élevage innovants en santé et bien-être animal à tous les stades de la conduite d’un élevage porcin.
Les élevages porcins sont aujourd’hui soumis à une pression croissante de la part de l’opinion publique pour améliorer les conditions de vie de ses pensionnaires. D’après un sondage réalisé par l’IFOP sur les français et le bien-être animal, 59% des français estiment que le niveau de bien-être animal est insatisfaisant en élevage. 79% d’entre eux pensent que les efforts doivent prioritairement concerner les porcs.
Face à ce constat, l’association LIT OUESTEREL a réuni des professionnels de la filière porcine (éleveurs, techniciens bâtiment, scientifiques spécialistes du bien-être animal, éthologues, sociologues, épidémiologistes, ergonomes, distributeurs, étudiants ou encore associations) afin d’élaborer ensemble des prototypes de bâtiments d’élevage porcin innovants en santé et bien-être animal, tenant compte des différentes contraintes économiques, techniques et logistiques et à tous les stades de l’élevage (verraterie, gestante, maternité, post-sevrage et engraissement).
Grâce à l’implication des professionnels lors du premier atelier et avec la participation de citoyens via un jeu concours, l’association a recueilli environ 200 idées pour concevoir des bâtiments porcins innovants en santé et bien-être animal. Elles ont été matérialisées par un jeu de cartes conçu pour l’occasion, et qui a servi par la suite aux professionnels pour imaginer leurs bâtiments.
Au total, 4 élevages ont été imaginés dans leur entièreté, de la naissance des porcelets à leur départ à l’abattoir. Plus que la nature des idées qui les composent, c’est leur combinaison qui a permis d’aboutir à des concepts innovants. Bien qu’uniques, ceux-ci partagent de nombreux points communs. En effet, ils incluent tous une augmentation des aires de vie des animaux (plus ou moins importante selon les concepts), une augmentation des accès à la lumière naturelle (selon des procédés variés), une diversification des types de sol, un enrichissement du milieu (de façon matérielle, auditive ou sociale), ainsi qu’une suppression de la contention permanente.
Ces aménagements ont lieu dans des bâtiments dont les besoins en eau et électricité sont en partie assurés par l’élevage (grâce à, respectivement, des récupérateurs d’eau de pluie, et des panneaux solaires ou la méthanisation). Ces concepts comprennent en leur sein, une gestion combinée de différents stades physiologiques pour limiter le stress de déplacement des animaux, animaux qui ne présentent par ailleurs plus aucune mutilation (arrêt castration, caudectomie et meulage des dents). Ces changements, commun à l’ensemble des 4 concepts imaginés, sont complétés pour chacun d’entre eux par des spécificités qui leurs sont propres.
Afin d’en rendre compte le plus fidèlement possible, chacun des quatre élevages a, dans un premier temps, été illustré sous forme d’esquisses. Dans un deuxième temps, des visites virtuelles immersives ont ensuite été développées, sur la base des esquisses réalisées, afin de rendre ce travail plus concret.
Pour favoriser l’émergence de ces concepts sur le terrain, une analyse prédictive de leurs impacts était essentielle. Ainsi, à l’aide des visites immersives réalisées pour chacun d’entre eux, citoyens et professionnels ont été sollicités :
– Côté citoyens, 38 ont été interrogés lors d’entretiens de 30 minutes au cours desquels les différents concepts leurs étaient présentés. Ainsi, l’objectif était de recueillir leur perception de ces nouveaux modes de logement, afin de vérifier si, et dans quelles mesures, ceux-ci pourraient permettre d’améliorer l’acceptabilité sociétale des élevages de demain.
– Côté professionnels, 15 ont été invités, pour ces élevages pensés pour être mieux acceptés par la société, à nous partager leurs impacts directs en chiffrant le coût de construction de ces nouveaux logements, mais également leurs impacts indirects en identifier leurs conséquences de ces nouveaux modes de logement sur les différentes performances d’élevages (bien-être animal, santé animale, environnement, condition de travail, performances techniques et zootechniques).
L’ensemble de cette analyse multicritère, menée à dire d’experts et de citoyens, a été synthétisée dans les graphiques radars disponibles ci-dessous. Elle a été menée comparativement à un élevage porcin standard actuel, pris comme référence et soumis à l’analyse de ces mêmes personnes.
Comparativement à l’élevage standard de référence, les 4 concepts d’élevage imaginés sont tous perçus par les experts comme plus vertueux en bien-être animal. Les concepts E1, E2 et E3 sont cependant plus perçus comme des évolutions plus ou moins importantes des bâtiments d’élevage standard existants (évolution incrémentale). Au contraire, le concept E4 est perçu comme une véritable évolution de rupture, le mode de logement étant totalement repensé et reconstruit autour des besoins des animaux.
Pour les concepts d’élevage correspondant à une évolution incrémentale du parc bâtiment (concepts E1, E2 et E3), on note que l’augmentation du bien-être animal s’accompagne d’une dégradation mesurée des performances techniques et zootechniques. Cependant, ces concepts sont marqués par une augmentation très importantes du coût d’investissement à la place, celui-ci étant d’autant plus important que le niveau de bien-être animal est élevé, du fait d’une surface de vie en bâtiment par animal de plus en plus grande et d’équipements d’élevage de plus en plus onéreux. Ce surcoût serait à mettre en balance avec les coûts de fonctionnement de ces élevages, et surtout le consentement à payer des consommateurs pour ces derniers, un peu plus proches de leurs attentes. En effet, bien que l’acceptabilité de ces élevages semble meilleure, elle reste toute de même plutôt basse. Une fois tous les coûts et intérêts de ces trois concepts connus, un travail sur les compromis devrait permettre d’aboutir aux élevages les plus souhaitables pour les élevages standards de demain.
Pour le concept d’élevage correspondant à une évolution en rupture du parc bâtiment (concept E4), on note que l’augmentation du bien-être animal s’accompagne d’une méconnaissance des experts sur les performances techniques et zootechniques, mais également sur l’ensemble des autres performances d’élevage, pressentis comme fortement dégradées. Par contre, ce concept est marqué par un très faible surcoût à la place, comparé à l’élevage standard. Si les hypothèses des experts s’avèrent justes quant à la dégradation des différentes performances d’élevage, le coût de fonctionnement devrait néanmoins venir alourdir le surcoût annoncé. Un travail sur la création de références de ces modes de logements innovants, centrés sur l’animal, est donc à entreprendre dans l’optique de leur déploiement, ce type d’élevage de niche, étant fortement apprécié par les citoyens interrogés.
15/11/2023